Dans le journal Ouest-Eclair* du 2 octobre 1923, le correspondant local relate en détaille l’incendie qui a eu lieu à l’église Sainte-Croix de Saint-Servan dans la nuit du dimanche 30 septembre au lundi 1er octobre 1923.
« Saint-Servan : Le feu à l’église paroissiale
Une sacristie est entièrement détruite.
Un incendie assez violent s’est déclaré au cours de la nuit de dimanche à lundi, dans l’église paroissiale de Saint-Servan. On put craindre un instant qu’elle fût complétement détruite.
L’alarme
Quelques minutes avant 11 heures deux vicaires de Saint-Servan, MM. Fortin et Macé, aperçurent du presbytère une lueur anormale provenant de la sacristie de l’église, rue Jeanne-Jugan.
Ils se rendirent compte aussitôt que le feu était dans l’église et s’empressèrent de donner l’alarme.
C’était exactement dans la petite sacristie, donnant accès par le chœur à la grande sacristie, que le feu s’était déclaré. Déjà les flammes avaient fait éclater les vitraux. Une épaisse fumée remplissait la sacristie.
Les vicaires aidées de M. le chanoine Desrées, curé, n’en entreprirent pas moins de sauver les ornements et les vases sacrés, renfermés dans la grande sacristie. Il y réussirent et sauvèrent de même les hosties consacrées se trouvant dans l’église.
Pendant ce temps, les cloches de l’église avaient sonné le tocsin et bientôt les pompiers arrivaient. Ils attaquèrent vigoureusement l’incendie sous la direction de leur capitaine M. Mantrand. Néanmoins, il apparut que les flammes gagnaient du terrain.
La toiture de la petite sacristie s’était effondrée et celle de l’église menaçait d’être atteinte.
M. Haize, maire de Saint-Servan, accouru dès le premier moment sur les lieux du sinistre, avait heureusement prévu ce danger et de suite il avait demandé du secours aux villes voisines de Saint-Malo et Paramé.
L’auto-arroseuse de Saint-Malo sauve la situation
Les soldats du 47è arrivaient bientôt avec leurs pompes, suivis de près par les pompiers de Saint-Malo, sous la conduite de M. Pinabel. L’auto-arroseuse de Saint-Malo suivit, et son puissant secours allait permettre d’arrêter les ravages du feu.
Il était temps, car bien qu’il soufflât un vent assez faible, les flammes léchaient déjà la toiture de l’église. L’intervention de l’auto-pompe devait être décisive et l’on put admirer la maîtrise et la sûreté de manœuvre des pompiers de Saint-Malo, dont les efforts devaient bientôt enrayer le développement du sinistre.
Moins d’une heure après leur arrivée, on était maître du feu. Il fallut cependant lutter longtemps encore et ce ne fut qu’un peu avant trois heures que l’incendie put être considéré comme à peu près terminé. Les pompiers de Paramé, arrivés entre-temps, avaient aidé à combattre le sinistre.
Nous avons dit plus haut que les prêtres, aidés des premières personnes accourues avaient sauvé les ornements et les vases sacrés. On s’occupa pendant l’incendie de déménager tout le mobilier : tableaux, chemin de croix, etc … La population prêta son concours au clergé pour mettre à l’abri les objets de valeur.
Les personnalités
Les autorités de Saint-Servan étaient accourues, dès le premier moment sur les lieux de l’incendie. Citons M. le Maire, ses adjoints et les membres du Conseil municipal; MM. Brouard, conseiller général, Savidan, procureur de la République; le lieutenant-colonel Tixier, commandant le 47ème; Coureaud, commissaire de police, qui, avec le capitaine Nicolet, commandant la gendarmerie de l’arrondissement, organisa le service d’ordre; Guillet, secrétaire général de la sous-préfecture; plusieurs officiers du 47e; la police, les gendarmes etc …
Mentionnons spécialement Mgr Le Fer de La Motte, évêque de Nantes, qui fit modestement la chaîne avec ses compatriotes servannais. Quand le danger fut définitivement écarté, M. le Maire tint à remercier chaleureusement les pompiers des villes voisines, ceux de Saint-Malo notamment dont le concours de l’avis général, permit de sauver l’église.
Les dégâts
Les dégâts semblent devoir être assez considérables. On les évalue, pour la petite sacristie complètement détruite à la somme de 200 000 francs. En outre, les flammes ont détérioré une partie de la toiture de l’église couvrant trois chapelles latérales. Ces chapelles ont dû être condamnées momentanément.
Quant à la cause du sinistre, on l’ignore complétement. L’enquête ouverte par la police a établi que le sacristain M. Reboux, avait fermé les portes à 7h30 du soir. Elles étaient fermées quand on s’aperçut de l’incendie et il était impossible de mettre le feu de l’extérieur. La malveillance doit donc être écartée, de même le court-circuit, le compteur électrique étant fermé. On en est réduit aux hypothèses. »
Le lendemain, le journal publie une photo de l’église ravagée par les flammes. Le correspondant en profite pour revenir sur l’origine de l’incendie. Il évoque les rumeurs : “veilleuse allumée qui aurait été renversée”, “un charbon enflammé resté dans un encensoir” …
Du côté de la Mairie, dès le dimanche suivant le conseil municipal qui fait le constat d’un sous-équipement de la commune pour faire face aux incendies, décide d’acquérir une auto-pompe et d’installer des extincteurs dans tous les bâtiments publics et d’en placer un peu partout en ville …
Le quotidien Ouest-Eclair a été publié de 1899 à 1944, avec un rayonnement sur tout l’Ouest de la France.Lancé au moment de l’Affaire Dreyfus, qu’il couvre abondamment, les 250 000 exemplaires sont atteints pour son 25e anniversaire. Durant la Seconde Guerre mondiale, malgré le contrôle de censeurs militaires, il continue de paraître. À la Libération, il est interdit pour collaboration et est remplacé par Ouest-France.
Laisser un commentaire