Le nom de Gargantua est indissociable de Rabelais. L’écrivain français lui consacre un ouvrage resté célèbre, au point de croire à tort, que le géant est né de son imagination. Avant d’être le héros d’une œuvre politique, Gargantua apparaît dans la mythologie celtique. Intégré pleinement à la légende arthurienne, il est créé pour protéger le célèbre roi breton. Ancrées dans la culture populaire française, de nombreuses traces de son passage subsistent un peu partout dans l’hexagone et notamment dans le Pays de Saint-Malo. Qui est vraiment « cet avaleur de bœuf et de rivières, le constructeur de sommets et de tumulus, le créateur de Rivières et de Marais ? » 

Qui est Gargantua ?

Les tribulations du géant se sont transmises oralement, de génération en génération. Issu de la culture populaire, il existe toutefois des chroniques Gargantines, retraçant sa vie qui se confond avec les légendes arthuriennes.

Tout débute lorsque le roi Arthur fait quérir Merlin pour l’aider à vaincre ses ennemis. Ce dernier va jusqu’en Orient pour faire naître, à l’aide des ossements de deux baleines et de ses aptitudes de nécromanciens, Grantgosier et Gallemelle. Ces deux géants, vont donner naissance à Garguantua. L’une de ces chroniques raconte : « Durant sa naissance, le soleil s’arrêta trois heures, la lune six heures les vents trois jours, et les arbres n’osèrent pas remuer une feuille avant trois mois. Un ermite du voisinage le baptisa, son clerc fut son parrain et il eut pour marraines Morgane et Philocatrix. » Toutes les Chroniques insistent tous sur le gigantisme, la force démesurée et sa goinfrerie. À trois ans, il mesure déjà 367 coudées, soit près de 180 mètres, deux fois plus grand que la Statue de la Liberté.

Pour rejoindre l’Angleterre, les trois géants traversent l’Europe et arrivent devant une étendue d’eau : la Manche. Ils déposèrent un caillou chacun, donnant naissance au Mont-Saint-Michel et à l’Îlot de Tombelaine. Là où seront enterrés les deux adultes qui contractent la fièvre à laquelle ils ne survivront pas.

Les aventures de Gargantua le mènent à Paris, en Anjou où il combat deux géants, à Londres où il sauve le roi Arthur des envahisseurs. À plusieurs reprises il revient en France, comme cette fois, où il est chargé par Merlin de ramener du sel de Guérande. Celui-ci ne va rien laisser aux villageois les rendant furieux. L’une de ses allées et venues entre l’Angleterre et le continent l’amène à Saint-Malo.

Rabelais présente Gargantua

Sur les traces du géant !

Comme dans le reste de la France, on trouve le nom de Gargantua attaché aux dolmens, aux menhirs, ou à ses empreintes laissées un peu partout. À Cancale, il jette les gravillons de sa chaussure et deviennent les rochers de Cancale. Un autre caillou jeté devient le Mont-Dol, idem d’un gravier de ses souliers avec lequel il créa le Rocher de Bizeux dans l’embouchure de la Rance. À Saint-Malo Gargantua avale 790 bœufs et a une indigestion. Il vomit le Petit et le Grand Bé. C’est avec le même procédé qu’il créé l’ile d’Agot, près de Saint-Briac. Malgré ces histoires potaches, selon la culture populaire, il a créé l’Anse de Vigneux où il laissa même une dent. Le Menhir de Chablé, haut de 5 mètres, retrace une légende inédite. « Doté d’un appétit insatiable, le géant, voulut un jour se repaître de son propre fils ! Quelques témoins hardis, outrés de ce qui allait se passer, écartèrent rapidement l’enfant et placèrent aussi vite un rocher à sa place. Se ruant sur cette pierre, Gargantua perdit une dent en refermant sa mâchoire sur le bloc de granit. Fou de rage et se lançant sur ceux qui le contrariaient dans sa funeste entreprise, il tua son fils au passage en lui assénant un coup de poing sur la tête ! Horrifiés par ce crime abominable, les témoins de cet acte harcelèrent à tel point Gargantua qu’il en devint malade et mourut un an, jour pour jour, après avoir perpétré son forfait. »

Le menhir dit Dent de Gargantua à Saint Suliac

Gargantua serait donc enterré au Mont Garrot. La légende raconte même qu’à cause de la taille, il fallut le plier en sept pour l’ensevelir ! Son fils fut enterré à l’endroit même où se produisit le drame et sa tombe fut recouverte par la dent de son père. Une histoire singulière car généralement, nos très loin ancêtres le percevait comme un dieu protecteur. Étonnamment, la côte d’Emeraude regorge à son sujet de nombreuses histoires funestes. Comme nous l’avons dit, ses parents sont enterrés dans la baie du Mont-Saint-Michel, lui-même reposerait entre le petit et le grand Bé, qui signifie tombe en Breton.

Contrairement aux légendes locales, les Chroniques détaillent après sa halte dans le clos poulet de nombreuses autres histoires dont son voyage jusqu’au Mont Sinaï en Egypte. Rappelé par Merlin pour protéger une nouvelle fois la population contre d’autres géants, c’est lors d’une halte qu’il va créer en urinant le Rhône. Il lui faudra quand même plusieurs jours !

Guy-Edouard Pillard, dans son ouvrage intitulé « Le Vrai Garguantua » écrit  : « Merlin, qui savait bien comment Garguantua avait besogné, vint le chercher et le transporta en féérie où étaient déjà le bon roi Arthur avec sa sœur Morgane, Ogier le danois et Huon de Bordeaux, où ils vivent encore et font bonne chère au château d’Avalon. » Une fin digne d’un Dieu !