Durant la guerre de Cent Ans, Saint-Malo est passée entre les mains de la papauté d’Avignon, du roi de France et du Duc de Bretagne. Malgré tout, elle a conservé son statut de port-franc et de Minihic (du breton Monachia : Monachus – Moine) c’est-à-dire un lieu où le droit d’asile peut être invoqué.

Henri Georges Gaignard, l’auteur de Connaître Saint-Malo écrit : « Tous hommes et femmes, de quelque nation qu’ils soient, qui se retirent en ladite ville de Saint-Mallo et requèrent et demandent la franchise d’icelle, jouissent de franchise et immunité en manière que, pour quelque homicide par eux commis hors ladite ville et mettes d’icelle, ils ne peuvent estre prins, arrestés ny detenus ».

Dans son livre Saint-Malo, Cité Corsaire, l’écrivaine Thérèse Herpin confirme: « Souvenons-nous que Saint-Malo de l’Île est un minihic où tous les hors la loi ont le droit de garder leur tête sur leurs épaules, sauf s’ils ont commis le crime de lèse-majesté ».

Ces deux auteurs mentionnent le plus célèbre des « réfugiés » : Henri Tudor, le futur roi d’Angleterre.

Henri VII d’Angleterre en exil en Bretagne

Le roi Henri VII

Dans la seconde moitié du XVème siècle, la guerre des Deux-Roses fait rage en Angleterre. Durant une trentaine d’années les maisons royales de Lancastre et d’York s’affrontent, entraînant une guerre civile discontinue. Cette lutte pour la couronne est appelée ainsi en référence aux emblèmes des deux maisons, la rose rouge de Lancastre et la rose blanche d’York.

Henri Tudor naît au Pays de Galles en 1457. Suite à plusieurs assassinats, Henri Tudor devient l’unique survivant de la Maison de Lancastre. Pour se protéger, il se réfugie en Bretagne et vit en exil pendant près de quatorze ans à la cour du duc François II de Bretagne.

D’abord assigné dans le magnifique château de Suscinio, dans le sud du Morbihan, Henri Tudor est déplacé au château de Largoet à Elven, par crainte d’une opération anglaise.

Henri VII trouve refuge à Saint-Malo

En novembre 1476, le duc de Bretagne tombe malade et ses conseillers vont négocier avec le roi d’Angleterre l’extradition d’Henri Tudor vers l’Angleterre.

Escorté par les Anglais jusqu’à Saint-Malo où un navire l’attend. La porte Saint-Vincent à peine dépassée, Henri Tudor feint des crampes d’estomac et dans la confusion, le prétendant au trône âgé de 19 ans échappe à la surveillance de ses ravisseurs et réussit dans les rues étroites de la cité corsaire à leur échapper. Poursuivi par les soldats Anglais, Henri Tudor se réfugie en la Cathédrale de Saint-Malo et invoque le droit d’asile.

Les Malouins ne voulant pas laisser les Anglais rompre la tradition du sanctuaire, surtout en entrant armés dans la cathédrale. Durant trois jours, Henri Tudor reste cloîtré dans la Cathédrale, les émissaires finissant par admettre qu’ils avaient échoué dans leur tentative de ramener le descendant des Lancastre en Angleterre.

Richard III lors de la bataille de Bosworth en 1485

Richard III lors de la bataille de Bosworth en 1485.

De Bretagne au trône d’Angleterre

De par sa conduite le successeur d’Edouard IV, Richard III, suscite beaucoup d’indignations. Profitant de ce fait, Henri Tudor prépare en Bretagne son retour en Angleterre. Le 1er août 1485, Henri s’embarque pour l’Angleterre où il va constituer une armée de partisans. Avec eux, il va réussir à battre Richard III lors de la bataille de Bosworth (1485), et à le tuer au combat. Son accession au trône et son mariage avec Elisabeth d’York, fille aînée d’Edouard IV met fin définitivement à la guerre des Deux-Roses.

Une histoire qui ne manque pas d’ironie lorsque l’on connaît la rivalité entre la Cité corsaire et les Anglais.